Guerre des fruits : les producteurs français obtiennent des contrôles renforcés
Ces deux dernières semaines, 150 camions ont été contrôlés et dix infractions relevées, a dit lundi le ministre de l’Agriculture, Stéphane Le Foll, qui recevait les producteurs.
La fédération nationale des producteurs de fruits (FNPF), celle des « Légumes de France« , le principal syndicat agricole la FNSEA et les Jeunes agriculteurs (JA) ont dénoncé des pratiques de dumping de la part des Espagnols, alors que les récoltes sont partout abondantes et inondent le marché à prix cassés.
Stéphane Le Foll leur a promis que « la campagne de contrôle pour vérifier le respect des règles de commercialisation des fruits et légumes » allait se poursuivre et que « les infractions seront sanctionnées« .
Simultanément, a-t-il indiqué, « la Commission européenne a été saisie par l’Espagne, la France, la Grèce et l’Italie pour demander la mise en place de mesures exceptionnelles de gestion du marché » des fruits et légumes.
Pour Luc Barbier, président de la FNPF, la guerre des pêches et nectarines qui fait rage, après celle des fraises au printemps, entre producteurs espagnols et français n’a jamais atteint un « tel niveau« , a-t-il expliqué à l’AFP. Il soupçonne les voisins espagnols de pratiquer « le dumping commercial pour tuer le marché français et rester ainsi les seuls fournisseurs« .
« La cotation sur le marché de gros espagnol est le double du prix de vente en France : en Espagne, on constate un prix moyen à 1,10 euro le kilo et ici il arrive à 57 centimes« , assure-t-il.
M. Barbier soupçonne aussi des pratiques interdites de « prix après-vente » qui consiste à fixer les prix payés par les importateurs en fonction du prix de vente sur le marché.
Pour contrer cette concurrence, il a réclamé « le renforcement des contrôles aux frontières et sur les marchés d’intérêt national, type Rungis ou Saint-Charles à Perpignan« , le premier marché de gros de la pêche et nectarine, afin de vérifier les bons de commande des fruits qui doivent préciser l’origine, la qualité et le prix.
– 50% de production en moins de 10 ans –
« Lors des contrôles que nous avons effectués ces quinze derniers jours, deux camions sur trois ne respectaient pas les règles« , affirme-t-il encore.
Si la guerre est déclarée c’est, selon lui, qu’il en va de la survie du secteur : le verger français en pêches et nectarines représente 10.000 ha contre 20.000 ha en 2004. La production française, de 400.000 tonnes, qui assurait alors la totalité ou presque de la consommation (450.000 t) est tombée à 190.000 t.
« En dix ans, on a perdu 50% de la production et si ça continue comme ça, on ne mettra pas dix ans à perdre les 50% qui restent« , prévient-il.
Pour Xavier Beulin, président de la FNSEA, la pêche cet été n’est que le symbole ponctuel d’un malaise bien plus large qui touche aussi les tomates, le melon ou le concombre et qui avait commencé avec les fraises, vendues en grande distribution 79 centimes la barquette.
« Le sujet de fond c’est un différentiel de coûts avec l’Espagne qui ne nous permet pas d’être compétitifs« , estime-t-il.
Mais il appelle aussi la grande distribution à tenir ses engagements à la suite de la réunion mi-juillet au ministère de l’Economie, et à « faire un effort de valorisation de l’origine France, sans toujours inciter le consommateur à aller vers le prix le plus bas » .
La Confédération espagnole des producteurs et exportateurs de fruits (Fepex) réfute quant à elle ces accusations : « la crise des fruits affecte tous les producteurs européens« , a dit lundi son porte-parole.
La Fepex, qui a condamné les attaques récentes près de Perpignan contre des camions espagnols, a demandé au gouvernement français d’empêcher qu’elles se reproduisent.
Elle aussi appelle l’Union européenne à prendre des mesures urgentes pour soutenir les marchés, car la production de fruits à noyau (pêches et autres) est essentielle pour le secteur agricole espagnol : l’an dernier il a exporté près de 910.000 tonnes. Pas loin d’un milliard d’euros au total, dont 331 millions rien que pour les pêches.