La filière agrumicole confiante pour les objectifs du Plan Maroc Vert
Augmentation des capacités de conditionnement, conquête du marché des jus et des concentrés, déploiement en Afrique: voici les pistes discutées par la filière agrumicole lors d’un tour de table au Ministère de l’agriculture le 10 Avril.
A mi-chemin du plan Maroc Vert 2008-2018, la filière agrumicole s’est réunie vendredi au Ministère de l’Agriculture, en présence d’un représentant des Finances, pour discuter des résultats de la campagne 2014-15 et faire un bilan d’étape: les objectifs pour 2018 devraient être atteints en terme de production.
En terme d’exportation, l’interprofessionnelle planche sur des mesures de compétitivité.
D’une campagne actuelle moyenne à des perspectives prometteuses
La campagne 2014-2015 a certes été moins riche que la précédente, mais il faut d’abord rappeler que les conditions climatiques n’ont pas été aussi bonnes (inondations de novembre, gel hivernal) et que la filière met les moyens en œuvre pour préparer des récoltes meilleures.
– Les objectives plantations de 2018 ont été atteintes depuis 2014. Alors que le Plan Maroc Vert ambitionnait 105.000 hectares plantés en 2018, nous sommes dès à présent à115.000 hectares plantés. « La filière agrumes est la plus dynamique des filières agricoles, c’est la seule qui arrive à ses échéances en termes de plantation », nous indique une source professionnelle de la filière.
– Alors que la feuille de route de la filière table sur une production de 2,9 Mt en 2018, elle devrait atteindre 2,5 Mt dès la prochaine campagne. L’objectif2018 pourrait bien être atteint à la campagne d’après. Les dernières estimations projetaient une production d’1,9 Mt d’ici à la fin de la campagne, contre 2,2Mt l’année précédente. La production sera faible cette année, en raison des difficultés éprouvées par la filière au cours des inondations et du gel hivernal.
– Quant aux objectifs d’export, on est encore loin des objectifs d’1,2Mt pour 2018. Au 25 mars, 376.476 T d’agrumes ont été exportées, contre 526.186 T l’année précédente à la même période. C’est le point le plus incertain de la campagne, puisque les mesures à prendre pour accompagner la production marocaine à l’étranger, par la recherche de valorisation et de compétitivité, sont encore en cours d’élaboration.
Toutefois, la filière a bien pris compte de l’enjeu de la valorisation. L’année précédente, les agrumes marocains avaient été pénalisés sur les marchés internationaux en raison de leur qualité inférieure. Pour la campagne actuelle, la filière s’est coordonnée pour repousser d’un mois les ventes à l’étranger, afin de proposer un produit supérieur, ce qui explique en partie la baisse du tonnage exporté.
– L’évolution des parts de marché à l’étranger révèle une nouvelle configuration des destinations d’exportation, avec une montée du client nord-américain destinataire de 23% des exportations, en hausse de 9 points par rapport à l’année précédente.
– Les USA et le Canada sont devenus les 2éme plus gros importateurs de petits agrumes marocains. La Russie reste le premier client, mais voit ses parts de marché baisser de 58 à41% cette année. Les agrumes marocains gagnent également un meilleur positionnement sur les étals européens, qui captent cette année 33% des exportations marocaines contre 25% l’année précédente.
Renforcer la compétitivité à l’international par une stratégie nationale
Lever les freins à l’exportation passe par une stratégie nationale. C’est la conclusion à laquelle sont parvenus les professionnels de la filière et les équipes du ministère de l’agriculture et des finances lors du tour de table de vendredi.
Le frein principal identifié vient de la chaîne de conditionnement des agrumes. Fin 2014, les capacités de conditionnement représentaient 25% de la production. Or, c’est à ce niveau que résident les potentiels de valorisation.
Un fruit exposé à une hausse de température de 10%, respire 2,5 fois plus, ce qui lui fait puiser dans ses réserves de sucre et donc perdre de sa valeur. Le fruit perd ainsi en sucre et en poids, sans compter le risque accru de pourrissement. Au niveau national, les pertes sont évaluées à40% de la production. La meilleure maîtrise du conditionnement est un aspect essentiel de la stratégie à l’export.
Deuxième proposition, investir de nouveaux marchés, comme ceux des jus et des concentrés. Le Maroc importe aujourd’hui plus de jus qu’il n’en exporte. Les capacités marocaines de transformation du fruit sont sous-exploitées. De plus, les produits marocains pâtissent de l’attractivité européenne, qui bénéficie de la faiblesse de l’euro.
Troisième axe de compétitivité: renforcer les débouchés sur le marché local et africain. Pour cela, il faut travailler sur les circuits de distribution, afin de proposer aux consommateurs la même qualité de produit que celle exportée en Europe et ailleurs.
Les chaînes de froid doivent être respectées, des procédures d’étiquetage mises en place, le nombre d’intermédiaires réduit, la logistique optimisée.
La stratégie vers le marché africain doit passer également par une réforme des conditions d’exportation posées par l’office des changes, avance notre source.
En effet, sur le marché africain, les filières de distribution sont différentes. Les opérateurs ne sont ni des centrales d’achat ni des supermarchés lesquels présentent des garanties bancaires. Les structures de distribution sont donc dominées par le secteur informel. L’Office des changes doit assouplir ses procédures pour permettre aux banques de garantir les opérations d’exportation vers l’Afrique.
Le potentiel local et africain est important selon les estimations de notre source. Le marché local représente un potentiel de 300.000 tonnes. L’avantage du marché africain, dont le potentiel est estimé de 120.000 à150.000 tonnes, est de présenter un faible nombre de concurrents. Les prix de l’agrume marocain restent plus compétitifs que ceux turcs ou égyptiens, et restent intéressants par rapport à l’Europe.
L’interprofession se montre optimiste pour le déroulé des campagnes futures. La filière sent que le gouvernement est à l’écoute, et qu’il est déterminé à jouer son rôle de régulateur et d’accompagnateur des producteurs.
Le Ministère de l’agriculture a demandé à la filière de plancher sur un plan d’action pour valoriser la transformation des produits, à l’instar de l’Espagne. Aujourd’hui, les professionnels travaillent sur la structuration de leur filière pour être intégrée à un écosystème agroalimentaire dans le cadre de la stratégie du Plan d’Accélération Industrielle.
Source : medias24.com