« Le brevet de la tomate résistante au Botrytis de Monsanto est une fraude »
La coalition internationale “No Patents on Seeds“ (pas de brevet pour les semences) et le Réseau Semences Paysannes, ont déposé un recours contre un brevet européen détenu par Monsanto sur des tomates issues de sélection conventionnelle (EP1812575). Les revendications du brevet portent sur des tomates naturellement résistantes au champignon Botrytis cinerea. Les tomates originales utilisées pour ce brevet proviennent de la banque internationale de gène de Gatersleben en Allemagne.
La résistance recherchée était déjà connue chez ces plants qui ont été simplement croisés avec d’autres plants de tomates. Monsanto a adroitement formulé un brevet afin de créer l’impression que des techniques de génie génétique ont été utilisées pour produire lesdites tomates afin de répondre au critère d’inventivité. “Sachant que les techniques de simples croisements (ici de tomates) ne sont pas brevetables, Monsanto a délibérément reformulé le brevet pendant la période d’examen afin de faire croire que des techniques de génie génétique étaient impliquées. Cependant, une lecture attentive du brevet montre que cela est simplement frauduleux.
Ces tomates n’ont pas été produites par transfert d’ADN isolé. L’Office Européen des Brevets (OEB) aurait du le relever” explique l’organisation “No Patents on Seeds“ (NPOS). “Ce brevet illustre bien à quel point il est facile, pour les entreprises comme Monsanto, de contourner les contraintes et interdictions existantes dans le droit des brevets.”. Selon le droit des brevets, “les procédés essentiellement biologiques d’obtention de végétaux ou d’animaux” ne sont pas brevetables. D’autre part, l’OEB a l’habitude de délivrer des brevets sur des plantes génétiquement modifiées. Monsanto détient déjà plusieurs centaines de ces brevets controversés. Cependant, dans le cas qui nous intéresse aujourd’hui, les tomates sont dérivées d’une technique de sélection par croisement classique, comme cela est décrit dans le brevet. De plus, il est très peu probable que de telles tomates soient créées par génie génétique car la résistance au botrytis semble être basée sur les effets combinatoires de plusieurs gènes au sein du génome des tomates.
Les séquences de gènes pertinentes ne sont pas connus en détails. Ainsi, une combinaison de gène peut être obtenue en croisant l’ensemble des génomes, mais pas en transférant de simples séquences d’ADN isolé. Les opposants accusent également Monsanto de biopiraterie : les tomates originales proviennent d’une banque internationale de gène située en Allemagne qui est supposée sauvegarder les semences pour le bien commun et de futures sélections végétales afin d’assurer la sécurité alimentaire mondiale. “Prendre des semences dans des banques internationales de gènes pour déposer des brevets sur des ressources génétiques, ce n’est rien de moins que du vol, de la biopiraterie et un abus du droit des brevets” dit NPOS. “ Les brevets sur des ressources génétiques stockées dans des banques de gènes internationales ont des implications énormes pour la disponibilité de la ressource pour les autres sélectionneurs et les paysans. Cela peut considérablement entraver voire bloquer l’accès aux plantes nécessaires pour de futurs sélections paysannes ou commerciales.” . Les parlementaires français ont commencé l’examen du projet de loi sur la Biodiversité1, qui sera débattu en juin au sein de l’Assemblée Nationale. L’exemple de ce dernier brevet de Monsanto illustre encore une fois la nécessité d’un texte fort et cohérent afin de garantir la protection des ressources génétiques ainsique des connaissances traditionnelles associées contre l’appropriation et la privatisation du vivant qui est loin d’être un problème uniquement présent dans les pays du sud. Lire plus