Maroc-agrumes : “La seule nouveauté cette année, c’est la revue à la hausse du taux de Brix“ déclare M. Lahbib LAAOUANE
Des mesures de contrôles plus pointus, de fortes précipitations et un tonnage export relativement faible ont marqué cette campagne agrumicole. Nous avons rencontré M.Lahbib laaouane délégué principal de l’EACCE à Agadir (Primeurs et Agrumes) qui nous a livré son point de vue.
Hortitechnews : Cette campagne, et en comparaison aux précédentes, les contrôles effectués par l’EACCE ont été plus pointus et plus strictes, comment vous avez pu assurer cette masse du travail supplémentaire, sachant qu’aucune réclamation sur le retard de votre côté n’a été enregistré ?
M.Lahbib LAAOUANE : Cette campagne n’est pas une campagne exceptionnelle au contraire, c’est une campagne ou les tonnages sont faibles par rapport à ceux de la campagne précédente, ce qui fait que la masse de travail, en quelques sortes, est moins importante que celle de l’année dernière. Cependant, et pour satisfaire à la haute demande des exportateurs on s’est organisé d’une manière à répondre aux besoins de chaque région instantanément. En effet, et dans chaque région nous avons une personne en charge d’un certain nombre de stations de conditionnement. Contrairement a ce qui a été dit, nous n’avons pas fait appel au personnel des autres établissements du royaume. Notre établissement s’est organisé avec son propre potentiel humain pour assurer un meilleur accompagnement aux producteurs et pour répondre à leurs demandes dans les plus brefs délais.
HTN: Comment est-ce que cette campagne l’EACCE s’est permis des contrôles aussi sévères et a refoulé plusieurs lots?
M. L.LAAOUANE : À mon avis il n’y a pas un de changements par rapport aux campagnes précédentes et les contrôles ont resté dans le cadre de la normale. La seule nouveauté cette campagne c’est le taux Brix qui a été revu à la hausse par la profession même et non pas par l’établissement. Ces efforts déployés ont eu lieu suite à la campagne catastrophique qu’a connu le secteur agrumicole marocain l’année dernière.
HTN : On a entendu dire que certains producteurs jugent qu’un Brix de 9,8 devrait passer et vous reprochent votre manque de flexibilité et que ceci va portez préjudice à leur rentabilité, comment vous arrivez à gérer ce genre de pression ?
M. L.LAAOUANE : Notre établissement a toujours eu l’habitude de gérer ce genre de tension et ce n’est pas la première année qu’on entend parler des réclamations.
L’année dernière on a commencé les récoltes avec un taux de brix de 8 à 8,5 ce qui a causé, comme vous le savez, des dégâts catastrophiques. Cette année, la profession a jugé elle-même qu’il faut rehaussez le taux du Brix et elle a fixé un minimum de 10. Le rôle de l’EACCE c’est d’assurer le respect de la “réglementation“ et les décisions du comité de coordination, si on commence a accepté des lots à 9,8 on aura des demandes à 9,6 ou 9,5 …. Etc.
HTN : Les importantes précipitations qu’a connu le Souss, ont eu un impact négatif remarquable sur la qualité, est ce qu’il n’aurait pas été plus sage d’arrêter complètement le conditionnement de la clémentine (précoce et de saison), car des arrivages de mauvaises qualité risquent de saper tous les efforts fournis afin de redorer l’origine Maroc ?
M. L.LAAOUANE : Pas du tout. On ne peut pas condamner une clémentine qui peut toujours être exportée. Et justement, le rôle de l’établissement c’est le contrôle pour éviter l’exportation des produits qui risquent d’évoluer.
HTN: Quels sont les dégâts après ces précipitations et avec quels taux ?
M. L.LAAOUANE : Les dégâts constatés ont été pour la clémentine, et surtout celle qui n’a pas été récoltée au moment opportun. Généralement c’est le Water spot qui est le plus remarqué. Ces précipitations ont favorisé également le développement d’une humidité relative élevée qui, avec la température, crée un milieu favorable pour le développement des maladies fongiques.
Les taux sont très variables, les producteurs qui ont fait plusieurs passages de cueillettes ont eu moins de dégâts que les autres. Certaines stations de conditionnement on était à 70% d’écarts d’autres à 40 à 45 % seulement.
HTN: Avez-vous reçu des échos sur les premiers arrivages après les précipitations de la part des clients ? Si oui peut-on savoir lesquels ?
M. L.LAAOUANE : Oui tout à fait. Les produits ont arrivé dans de bonnes conditions et on n’a eu aucune réclamation jusqu’à ce jour. Il faut mentionner aussi que cette campagne a une caractéristique principale c’est que les produits marocains se liquident juste après leur arrivée aux pays de destination ce qui empêche également l’évolution des maladies de conservation.
HTN: Cette campagne, le retardement des récoltes et les contrôles sévères ont engendré un coût supplémentaire et l’exportation d’une quantité de clémentine relativement faible par rapport au tonnage produit, pensez-vous que ceci va durer durant les prochaines campagnes ?
M. L.LAAOUANE : Tout d’abord il faut noter que les dates d’entrée en récolte ont été également arrêtées par la profession, sur ce point aussi notre rôle c’est seulement le respect de la décision du comité de coordination. Toutefois, je crois que ça va continuer de même parce que ce sont des paramètres qui se sont mises en place pour assurer la qualité de produit et éviter les erreurs du passé. On prend le taux du Brix par exemple, la profession l’a rehaussé parce qu’elle s’est rendue compte que les taux qui ont été fixés les années précédentes ont affecté négativement l’image de marque du produits marocains, les fruits ont été fades et le gout n’était pas apprécié par les consommateurs.
HTN : A votre avis, pourquoi les autres régions ne subissent pas le niveau de contrôles que Souss-Massa-Draa (Beni Mellal, Berkane… par ex) ?
M. L.LAAOUANE : C’est la même réglementation et les mêmes normes en vigueur mais chaque délégation s’organise à sa manière.
Ici sur la région on a plus que 80% de la production marocaine des produits frais, on a aussi un périmètre très étendu (plus que 150 Km de rayon) en plus des tonnages qui atteignent plus que 100 à 120 tonnes annuellement alors que la région de Berkane, par exemple, ne produit que 40 à 45 tonnes.
HTN : Le secteur agrumicole de la région de Souss-Massa-Draa a subi, pour la deuxième année consécutive, une campagne difficile, pensez-vous qu’ils que producteurs de la région devront revoir leurs stratégies ?
M. L.LAAOUANE : Absolument, si on veut répondre aux demandes des consommateurs les producteurs doivent revoir leurs stratégies, on ne peut plus se permettre de produire ce qui n’est pas demandé par le marché. Les producteurs doivent revoir leurs stratégies de production, de gestion et de conduite du verger.
Certains clones n’arriveront jamais à atteindre un taux de brix de 10 par exemple, le couple variété porte greffe doit donc être revu. Chose qui est également valable pour le nombre de passage de récoltes pour minimiser les risques en cas d’intempéries.