Maroc : Saison agricole presque compromise
La saison agricole 2015-2016 ne s’annonce pas sous de bons auspices. « L’espoir est encore permis. Mais au fil des jours, les chances de sauver les meubles s’amenuisent », indique Ahmed Derrab, SG de l’Association des producteurs d’agrumes du Maroc (ASPAM), résume la situation.
L’heure est en effet grave : le mois de décembre touche à sa fin, et les pluies ne se profilent toujours pas à l’horizon. Une situation qui donne du fil à retordre aux agriculteurs. « Les cultures précoces sont dans une mauvaise posture. Si, durant la première moitié du mois de janvier, les pluies ne tombent toujours pas, on pourra dire que la saison est compromise. Ceux qui en font les frais sont en premier lieu les céréaliers et les éleveurs », explique Ahmed Derrab.
Lueur d’espoir
Le ministère de l’Agriculture ne dit pas le contraire : « La campagne agricole actuelle se caractérise par un retard des précipitations au cours du mois de novembre, ce qui a occasionné à date d’aujourd’hui un déficit pluviométrique de 47% par rapport à une campagne normale, soit un déficit de 60 mm », indique-t-il dans un communiqué, tout en tentant de rassurer: « Certaines régions ont, toutefois, enregistré de bons niveaux de pluviométrie. En l’occurrence, les zones de l’Oriental et du Sud-Est ont reçu suffisamment de précipitations, en comparaison avec une année normale ». Sur le terrain, la réalité est plus alarmante dans nombre de régions. Les zones pluviales (non irriguées), qui représentent jusqu’à 80% des terres emblavées, s’attendent à une saison difficile. « Je crains que de la saison soit bel et bien compromise pour la céréaliculture. Même si les pluies tombent aujourd’hui, il sera très difficile de redresser la situation », indique un céréalier de la région de Doukkala.
Le département de Aziz Akhannouch évoque quelques facteurs qui pourraient limiter les dégâts : « plusieurs facteurs atténuent les effets du retard des pluies, notamment le taux de remplissage des barrages à usage agricole, qui se situe à 63% (à mi-décembre) avec des taux assez importants au niveau des périmètres irrigués, qui affichent un disponible de 8,5 milliards de m3 ». Et d’ajouter : « la campagne céréalière record de 2014-2015 a permis de constituer des stocks importants en paille et en orge qui se situent respectivement à des prix de 1,11 et 2,49 DH/kg (fin novembre), soit des niveaux stables en comparaison avec la campagne passée ». Cela dit, le ministère de tutelle n’a pas encore annoncé de mesures concrètes pour faire face à cette situation.
Plan d’action « en gestation »
Tout au plus, une réunion a eu lieu le 15 décembre dernier au siège du ministère de l’Agriculture, sous la présidence de Aziz Akhannouch. Responsables centraux, offices et établissements sous tutelle, directeurs régionaux du département, banque et assurance concernées… plusieurs acteurs ont été de la partie. À l’issue de cette réunion, le département de l’Agriculture s’est fendu d’un communiqué où il explique que « les travaux ont porté sur les perspectives d’avancement de la campagne agricole et la mise en place de différents scenarii en adéquation avec les besoins qui seront exprimés selon l’évolution de la pluviométrie dans les semaines à venir. Plusieurs actions sont à l’étude pour venir, au besoin, en soutien aux agriculteurs et pourraient, si nécessaire, aboutir à un programme d’intervention qui serait présenté au gouvernement ».
Mais jusque-là, rien n’a encore filtré sur les mesures que le ministère compte mettre en place. Pour Ahmed Derrab, le ministère a l’habitude de prendre un certain nombre de mesures pour accompagner les agriculteurs dans cette phase difficile. Il en est ainsi du rééchelonnement des dettes et du soutien des éleveurs. Il y aussi l’assurance agricole. Selon le ministère de tutelle, le chantier de l’assurance agricole avance bien avec 872.000 hectares couverts à aujourd’hui. Il est attendu d’atteindre, dans les prochaines semaines, l’objectif de 1 million d’hectares, couvrant ainsi environ 33% de la superficie emblavée. L’on reste donc loin de couvrir l’ensemble des agriculteurs. De plus, « le montant des indemnisations demeure modeste et insuffisant pour limiter les pertes », estime le SG de l’ASPAM.
Source : leseco.ma