Recrudescence de la Tuta absoluta dans le Souss, interview avec M. ELBALBAL
Pour parler de la recrudescence de la Tuta absoluta (mineuse de la tomate) nous avons rencontré M. Mustapha El BALBAL, responsable technique au sein du groupe SOFPRIM.
M. ElBALBAL un agronome passionné qui a une expérience de plus de 18 ans dans la conduite technique de la tomate.
HortiTecNews : Nous avons remarqué une recrudescence de la Tuta absoluta dans le Souss, confirmez-vous cet état ?
Mustapha Elbalbal : En fait le cycle ‘’normal’’ (août-juin) de la campagne passée s’est déroulé comme d’habitude, un à deux traitements, bien ciblés, contre ce ravageur ont été suffisants. C’est le cycle d’été qui a connu une attaque plus sévère que les dernières années. Pour la culture de la campagne actuelle, que nous venons de planter, j’ai remarqué une présence d’adultes de ce ravageur dans les serres un peu plus élevée que les années d’avant, mais c’est encore précoce de prédire comment les choses vont évoluer.
HTN : à votre avis qu’elle serait la cause derrière ce retour de la Tuta absoluta ?
M.E : la Tuta absoluta est un ravageur très prolifique et reste potentiellement très dangereux pour la tomate. Même les chaleurs très élevées ne la freinent pas, contrairement à la mouche blanche.
Les premières années après son entrée au Maroc, en 2009 et 2010, cet insecte avait fait des ravages et nous a obligés de faire énormément de traitements. Afin de le maîtriser, la majorité des producteurs a opté pour la lutte biologique, notamment les lâchers du Nesidiocoris tenuis qui s’est avéré un prédateur très efficace qui a permis une réduction phénoménale de la population de cette mineuse. Quoi que cet auxiliaire pose un petit problème lui aussi, car en absence de proie il s’attaque à la tomate elle-même pour s’alimenter de la sève et nécessite même une intervention chimique pour limiter ses dégâts. Après quelques années de lâchers de ce prédateur, qui s’est aussi multipliés dans la nature, ont permis une réduction considérable de cette mineuse au point que la plupart des producteurs ont laissé tombé la lutte biologique ; à cause de son coût qui reste élevé et surtout le manque de flexibilité quant à l’utilisation des pesticides contre les autres ravageurs, notamment Bemisia tabaci transmetteur du virus TYLC.
En plus, l’homologation au Maroc d’insecticides spécifiques et plus efficace contre Tuta absoluta, notamment à base du Chlorantraniliprole et Lunéfénuron, a encouragé les producteurs de tomates dans cette voie. Ceci a, certainement, conduit à une réduction du Nesidiocoris dans la nature et ainsi la Tuta s’est ‘’libérée’’ de son ennemi numéro 1 et a pu proliférer.
HTN : y’aurait-il d’autres facteurs possibles derrière cette recrudescence ?
M.E : Oui, on peut soupçonner une résistance vis-à-vis des matières actives très utilisées par les producteurs de tomate, parfois plus que le nombre d’applications recommandées par les fabriquant (2 à 3 fois par cycle). Il faudra aussi alterner non seulement les matières actives, mais aussi utiliser des familles chimiques différentes et ceci demande une bonne connaissance de la part des responsables techniques.
Un autre facteur a peut être pu avoir une influence, c’est la faiblesse des précipitations dans la région de Souss-Massa cette année qui a conduit a une quasi absence de couvert végétal, en dehors des fermes qui sont traitées, et donc absence d’habitat pour le Nesidiocoris…
Présentation et historique de Tuta absoluta :
Tuta absoluta (la mineuse de la tomate) est un très petit lépidoptère (papillon) de la famille des Gelichiidae
Répartition géographique :
T. absoluta est originaire de l’Amérique du sud. Elle a été déclarée pour la première fois en Argentine en 1964, d’où elle s’est propagée vers les autres pays de l’Amérique latine. Elle n’est apparue dans le bassin méditerranéen, (en Espagne) qu’en 2006, en Algérie et en Tunisie (2008). Signalée au Maroc pour la première fois en Avril 2008 dans la région de Nador. Elle se trouve répandue actuellement dans toutes les régions maraîchères.
Plantes hôtes :
Tuta absoluta se développe principalement sur la tomate mais peut attaquer d’autres solanacées comme la pomme de terre, l’aubergine et le poivron…etc.
Symptômes et dégâts:
La larve est le stade nuisible de la mineuse de la tomate. Elle peut attaquer tous les organes de la plante.
Sur feuilles: Les attaques se manifestent sous forme de galeries blanchâtres renfermant chacune une chenille. Avec le temps les
galeries se nécrosent et brunissent.
Sur tiges : Les jeunes tiges et pédoncules présentent des points noirs et des nécroses.
Sur fruits : Les tomates présentent des nécroses sur le calice ou des trous de sortie à leur surface. Aussi, les fruits verts et mûrs peuvent être attaqués. Généralement, les premiers symptômes apparaissent
au niveau des parties jeunes de la plante.